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Les traducteurs sont amenés à traduire principalement deux sortes de texte à caractère journalistique : les communiqués de presse et les articles. La traduction des communiqués de presse assure une diffusion plus large des messages quils véhiculent. En particulier, les organisations internationales veillent à publier leurs communiqués dans leurs langues officielles. Parmi les articles à traduire, il y a d'une part ceux que des revues destinées avant tout à une zone linguistique particulière font traduire dans une ou plusieurs langues. C'est ainsi que la National Geographic Society publie notamment une édition française de sa revue. D'autre part, certaines publications paraissent simultanément dans plusieurs langues. Par exemple, le Forum du désarmement est une revue publiée en français et en anglais par l'Institut des Nations unies pour la recherche sur le désarmement. Rares sont ceux qui sont spécialisés dans la traduction de tels textes, qui exige à la fois des compétences de traducteur et un talent journalistique. Promu malgré lui traducteur-journaliste, celui qui traduit un texte relevant du journalisme est tenu de connaître et, dans la mesure du possible, dappliquer les règles qui s'imposent aux journalistes. Il doit adapter l'original si l'auteur de celui-ci les a enfreintes, ce qui est fréquent. Ici, il sera avant tout question des textes contenant des nouvelles. Une nouvelle est un fait récent, présenté dans son contexte et de nature à intéresser le lecteur. Pour conserver sa fraîcheur à la nouvelle, le traducteur se doit de traduire le texte toutes affaires cessantes. En outre, il doit connaître son contexte ou se documenter à son sujet. Mais sa tâche principale consistera à susciter et à maintenir lintérêt du lecteur. Soyons clairs Tout texte journalistique doit être clair et attrayant. Il se fait du reste que ce qui est obscur est par là même rebutant. Si le fond du texte ne dépend pas du traducteur, celui-ci dispose en revanche d'une certaine latitude en ce qui concerne la forme : il peut et doit présenter des informations trop arides de façon explicite et dans un style vivant. Il est essentiel de tenir compte des destinataires du texte. Si l'information est destinée à un public averti, il faut utiliser un style approprié et la terminologie correcte. L'exactitude de celle-ci contribue en effet à conférer de l'autorité aux informations présentées. Le plus souvent, cependant, les destinataires du texte sont des profanes. Un communiqué de presse est généralement lu par un journaliste qui n'a qu'une connaissance approximative du sujet traité. Si les informations sont destinées en fin de compte à un large public, elle doivent être comprises par le plus grand nombre. Seul le minimum est censé être connu. En conséquence, la clarté et la simplicité sont de rigueur. Il convient, par exemple, de substituer « le virus du sida » au « virus de l'immunodéficience humaine » et a fortiori a l'énigmatique « VIH » et d'écrire « organes producteurs de sang » plutôt qu'« organes hématopoïétiques ». Tout énoncé manquant de clarté est de nature à dérouter le lecteur. Le traducteur est tenu de se documenter ou de consulter l'auteur pour éclaircir les points obscurs. La clarté passe le plus souvent par la simplicité. En particulier, il ne faut utiliser des sigles qu'après avoir présenté l'expression complète, suivie du sigle entre parenthèses. Dans un exemple tiré de la pratique, la traduction littérale dun titre (« Le CCI organise le premier Forum des entreprises ») aurait plongé dans la perplexité tout lecteur ne sachant pas que le CCI est le Centre du commerce international. Le traducteur a donc dû remédier au manque daptitude à la communication de lauteur de loriginal. Le nom des personnes citées doit être suivi de leur titre ou de leur qualité ; ce qui compte, cependant, c'est moins l'exactitude du titre sur le plan administratif que le recours à une dénomination qui permette de situer l'intéressé. Sil est question dune personne en début d'article, il ne faut pas s'attendre à ce que le lecteur se souvienne de son nom 30 lignes plus loin. On appliquera alors l'adage « bis repetita placent ». Clarté ne signifie cependant pas simplification abusive et il ne faut pas prendre le lecteur pour un simple d'esprit. Le traducteur-journaliste doit rester en deçà du niveau de compréhension des plus cultivés, mais accroître le niveau de culture du public ordinaire. Cela dit, il est parfois difficile d'être clair et concis, tout en restituant l'information de façon exacte et complète, surtout quand celle-ci est assez technique. Il convient alors de faire un arbitrage entre ces différents objectifs. Accrocher sans racoler Le titre, élément décisif de l'éveil de l'intérêt dun lecteur a priori indifférent, permet au traducteur de donner toute sa mesure, car il jouit à son égard dune grande liberté de manoeuvre. Idéalement, un titre doit être à la fois court et explicite. « Madame l'arbitre », titrait le Monde au-dessus dun bref portrait d'un arbitre féminin de football. Pour être concis, un moyen commode consiste à indiquer dun mot le contexte et à présenter ensuite linformation ; par exemple, « Jolo : Paris craint pour ses deux otages » (Le Figaro). Il ne faut toutefois pas se livrer à des contorsions extraordinaires à seule fin d'être lapidaire. Chaque journal a son style : Libération privilégie les titres percutants, tandis que le Monde a souvent recours à des titres sobres mais longs. De même, le traducteur devra trouver le ton qui convient à son client ou employeur. Un titre trop accrocheur peut nuire à l'impression de sérieux que l'on veut donner aux informations diffusées. En effet, le titre choc est privilégié par la presse populaire, tandis que les journaux de haute tenue le réservent aux informations plus légères. En 1977, un tueur en série terrorisait New York. Quand on l'arrêta enfin, le New York Post titra en lettres rouges et géantes un seul mot : CAUGHT. Telle était la psychose qui régnait dans la ville que tous les New-Yorkais comprirent aussitôt qui avait été appréhendé. La recherche du titre choc peut conduire aux pires excès. Lorsque le sous-marin britannique HMS Conqueror coula le croiseur argentin General Belgrano en mai 1982, causant la mort de centaines de marins argentins, le Sun se déshonora en titrant « Gotcha! » Si un titre doit attirer l'attention, son principal attrait doit provenir de l'intérêt intrinsèque de la nouvelle qu'il résume. Exemple : « Un nouveau médicament contre le sida va être commercialisé au sein de l'Union européenne » (Le Monde). Un titre plus ronflant aurait été à proscrire, car le lecteur se serait senti floué en se rendant compte, à la lecture de l'article, que les vertus du médicament en question étaient bien limitées. Le langage des titres n'est pas le même dans le monde anglo-saxon qu'en France. Les anglophones utilisent avec prédilection certains mots courts que l'on retrouve rarement dans l'article proprement dit : axe, bid, cut, hike, hit, leap, loom, raid, rap, row, shock, slam, slay, split, vow, etc. En général, les titres anglais font l'économie des articles. Le traducteur doit s'efforcer de trouver un titre qui lui soit personnel, sans être esclave de l'original. Plusieurs procédés lui permettent d'utiliser le titre pour donner un peu plus de tonus à un article ou à un communiqué de presse quelque peu anodin:
L'imagination semble être au pouvoir dans Libération, mais la recherche de l'originalité à tout prix peut faire long feu : « Le plan-plan Bayrou pour les universités » et « Les ovins atteints de "tremblante" quittent l'assiette ». Le lecteur intrigué par le titre peut abandonner la lecture de l'article une fois qu'il aura compris l'allusion. Continue, tu m'intéresses Il ne suffit pas qu'un texte soit diffusé : encore faut-il qu'il soit lu. En effet, si le lecteur, au départ peu intéressé, perd le fil ne serait-ce qu'un instant ou éprouve une sensation d'ennui si brève soit elle, il abandonnera en cours de route. Il faut donc maintenir en permanence son intérêt et linciter à lire le texte jusquau bout. Le communiqué de presse a la particularité de sadresser au lecteur final par l'intermédiaire des journalistes. Son auteur doit convaincre ces derniers que les informations présentées intéresseront ses lecteurs. Les règles applicables aux articles le sont donc également aux communiqués de presse. Il faut séduire les journalistes en donnant aux informations une forme attrayante. Si celles-ci intéressent le journaliste, souvent blasé, elles sont à plus forte raison de nature à trouver un écho auprès des lecteurs. Comme un journaliste est toujours pressé, les informations doivent être immédiatement exploitables, « précuites », pour qu'il puisse lui-même les communiquer à ses lecteurs en procédant à un minimum de réécriture. En conséquence, l'auteur du communiqué doit respecter toutes les règles qui simposent au journaliste. Les informations présentées dans un communiqué sont en concurrence avec une myriade d'autres qui cherchent toutes à retenir l'attention du journaliste. Il faut donc se battre pour que ses informations fassent passer la plupart des autres au second plan. La lecture d'un texte doit être considérée comme une tâche. Le lecteur ne la mène à bien que s'il est motivé. Les psychologues ont mis en évidence la tendance naturelle de l'être humain à vouloir mener jusqu'au bout une tâche entreprise. A cela s'oppose la loi du moindre effort. Un texte journalistique doit donc être attrayant, car il s'agit d'éveiller l'intérêt du lecteur et de le maintenir jusqu'au bout du texte. Si le style est vivant, dynamique, personnel et naturel, il sétablit une relation entre le rédacteur et le lecteur, l'article ayant le caractère d'une causerie. Pour autant que le sujet s'y prête, le style peut même être familier ou humoristique. Les métaphores facilitent la compréhension et concourent à l'attrait de l'article, à condition quelles soient naturelles. Dans la pratique, un traducteur est souvent obligé de gommer des métaphores tellement artificielles quelles en deviennent ridicules. Le texte doit être divisé en paragraphes qui ne doivent pas être trop longs. Le traducteur peut aller à la ligne quand l'auteur de l'original aurait dû le faire. Dans la mesure du possible, il faut assurer une bonne transition d'un paragraphe à l'autre (en utilisant « donc », « en revanche », « cependant », « en outre », « d'autre part », « pour sa part », etc.). L'ensemble du texte doit avoir un fil conducteur clair, mis en évidence par la division en paragraphes et la transition d'un paragraphe à l'autre. Les intertitres contribuent à structurer le texte et à maintenir lintérêt du lecteur. Bien que ce dernier soit désireux de mener à bien sa tâche de lecture, il n'aura peut-être pas le courage d'aller jusqu'au bout dun texte par trop rebutant. En revanche, il aura du mal à se dérober à l'achèvement d'une tâche partielle, telle que la lecture des quelques lignes qui le séparent de la fin d'un paragraphe ou dune charnière du texte, marquée par l'intertitre suivant. Celui-ci doit soutenir ou ranimer l'intérêt, pour que la lecture se poursuive et que, détape en étape, le lecteur aille jusqu'au bout du périple. Autrement dit, il faut diviser le texte en sections assimilables, car il ne faut pas s'attendre à ce que le lecteur nen fasse qu'une bouchée. Un paragraphe ne devrait jamais compter plus de 75 mots et, idéalement, il faudrait que sa longueur soit comprise entre 25 et 60 mots. Il vaut mieux raccourcir un paragraphe que de diviser artificiellement l'expression d'une idée en plusieurs paragraphes. Le traducteur est maître de la division en paragraphes et peut synthétiser quelque peu les développements filandreux. Il est essentiel que le texte soit fluide, car tout ce qui interrompt la lecture ou fait perdre le fil engendre une diminution de lintérêt. En particulier, le renvoi à des notes doit être proscrit : le traducteur veillera à incorporer ces dernières dans le texte. Toute redite doit être éliminée car elle ne peut que prêter à confusion, dans la mesure où le lecteur y cherche vainement un sens supplémentaire. En conclusion, les impératifs de clarté, de création de lintérêt et daccompagnement du lecteur dans sa tâche de lecture laissent une grande latitude au traducteur. Cependant, il faut savoir raison garder et ne jamais s'écarter de l'original par plaisir. Sil convient de s'affranchir d'un original imparfait, cest uniquement dans le but de mieux le servir. |
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